Dans cette fiche pratique, SUD éducation fait le point sur le versement de l’indemnité éducation prioritaire aux AED et AESH.
C’est quoi l’indemnité REP/REP+ ?
C’est une indemnité dite de sujétion, liée à l’exercice des fonctions dans une école ou un établissement relevant d’un réseau d’éducation prioritaire (renforcée). Elle est encadrée par deux textes juridiques :
- le décret n° 2015-1087 du 28 août 2015 portant régime indemnitaire spécifique en faveur des personnels exerçant dans les écoles ou établissements relevant des programmes « Réseau d'éducation prioritaire renforcé » et « Réseau d'éducation prioritaire » ;
- l’arrêté du 28 août 2015 fixant les taux annuels en application du décret n° 2015-1087 du 28 août 2015 portant régime indemnitaire spécifique en faveur des personnels exerçant dans les écoles ou établissements relevant des programmes « Réseau d'éducation prioritaire renforcé » et « Réseau d'éducation prioritaire ».
La politique dite “d’éducation prioritaire” a pour objectif de corriger les inégalités liées à la situation sociale et économique des habitant·es de zones défavorisées, par un renforcement de l’accompagnement éducatif et pédagogique. L’indemnité est présentée comme une mesure visant à stabiliser les équipes éducatives et pédagogiques ainsi qu’à reconnaître l’engagement des personnels exerçant dans les REP/REP+.
Comment savoir si je travaille en REP ?
En règle générale, si vous travaillez dans une école ou un établissement faisant partie d’un réseau d’éducation prioritaire, vous êtes déjà au courant. La liste des écoles et établissements composant les réseaux d’éducation prioritaire est fixée par arrêté. En cas de doute, vous pouvez demander à vos collègues.
Vous pouvez aussi, en cas de service partagé entre plusieurs établissements, travailler à la fois en éducation prioritaire et hors éducation prioritaire.
Qui a droit à cette indemnité ?
En janvier 2020, SUD éducation a lancé une campagne nationale pour le versement de l’indemnité REP/REP+ aux AED et AESH exerçant en éducation prioritaire, notamment par le biais de divers recours juridiques. En effet, jusque-là, elles et ils étaient les seul·es à ne pas la percevoir.
En avril 2022, le Conseil d’État a rendu une première décision, considérant que les AED devraient elle·eux-aussi percevoir l’indemnité éducation prioritaire. Il donnait au ministère six mois pour faire appliquer la décision.
La mesure a été budgétée au budget 2023 et un décret, modifiant celui de 2015, a été publié le 8 décembre 2022, accordant l’indemnité aux AED et aux AESH.
À partir de quand va-t-on la percevoir ?
Le décret n°2022-1534 du 8 décembre 2022 modifiant le décret n°2015-1087 du 28 août 2015 prévoit un versement de l’indemnité REP/REP+ aux AESH et AED à compter du 1er janvier 2023 ; l’indemnité devrait donc apparaître sur la fiche de paye du mois de janvier, sous la forme [indemnité suj REP].
Quel est son montant ?
C’est là que réside tout le scandale de cette mesure : prêt à tout pour ne pas avouer une cuisante défaite, et pour ne pas faire oublier aux AED et AESH qu’il les considère comme des sous personnels, le ministère a prévu que les montants de l’indemnité soient inférieurs de 36% à ceux versés aux autres personnels !
- Le montant annuel de l’indemnité REP est fixé, pour un temps plein, à 1 106 € pour les AED et AESH contre 1 734 € pour les autres personnels ;
- Le montant annuel de l’indemnité REP+ est fixé, pour un temps plein, à 3 263 € pour les AED et AESH contre 5 114 € pour les autres personnels.
L'indemnité d'éducation prioritaire est versée mensuellement, au prorata de la quotité de travail.
Vous trouverez dans le tableau ci-dessous quelques exemples de montant mensuels, en fonction de la quotité de travail :
-
à 50%
à 62%
à 100%
REP
46,08 €
57,14 €
92,17 €
REP+
(part fixe)
135, 96 €
168, 59 €
271, 92 €
* Pour calculer le montant de votre indemnité, il faut prendre le montant annuel, le rapporter à votre quotité de travail et le diviser par 12. Par exemple, en REP pour une quotité de 50% : 1106x0,50/12 = 46,08 euros.
Notons que le ministère en a profité pour ajouter comme bénéficiaires de l’indemnité éducation prioritaire les inspecteur·trices de l’éducation nationale dès lors qu’un établissement ou une école de leur secteur est classé éducation prioritaire. Pourtant, ils et elles ne travaillent pas au contact des élèves. Rien ne vient justifier ce cadeau qui leur est fait, si ce n’est, pour le ministère, d’avantager toujours plus la hiérarchie.
C’est quoi la part modulable de l’indemnité REP+ ?
En REP+, en sus de la part fixe, une part modulable est versée à l’issue de chaque année scolaire ; sont le montant maximal est fixé pour les AED et AESH à 448 euros (contre 702 euros pour les autres personnels). Cette part modulable a été instituée en juin 2021 pour être attribuée au mérite : SUD éducation s’oppose à cette volonté du ministère de mettre en concurrence les personnels.
Le versement est-il rétroactif ?
Le 8 novembre 2024, la Cour administrative d'appel de Paris a rendu une décision jugeant que, comme le soutenait SUD éducation, les AESH auraient du percevoir l'indemnité REP/REP+ depuis 2015 lorsqu'elles⋅ils exerçaient leurs missions dans des écoles et établissements relevant de l'éducation prioritaire. Les juges de la Cour administrative d'appel de Paris ont considéré que cette exclusion constituait une rupture d'égalité et ont condamné les rectorats de Créteil et de Paris à verser les sommes dues aux collègues qui attaquaient leur employeur.
À la rentrée 2020, la fédération SUD éducation avait lancé une campagne nationale pour arracher le paiement de l'indemnité REP/REP+ aux accompagnant⋅es des élèves en situation de handicap qui en étaient injustement exclu⋅es depuis sa création en 2015. Des centaines de collègues, dans différentes académies, ont adressé des courriers de demande de versement des sommes dues à ce titre à leur hiérarchie, l'objectif étant ensuite de saisir le Tribunal administratif (TA).
À Paris et dans le 93, des décisions ont été rendues en décembre 2022 :
- le Tribunal administratif de Montreuil, saisi par une dizaine de collègues, avait rejeté les demandes de versement de l'indemnité dans tous les dossiers ;
- le Tribunal administratif de Paris, saisi par une vingtaine de collègues, avait quant à lui -sur le seul dossier jugé à l'heure actuelle, les autres étant toujours en attente- reconnu l'inégalité de traitement.
Dans les deux cas de figure, la Cour administrative d'appel avait été saisie : soit par les collègues AESH déboutées, soit par le ministère pour le dossier de Paris. SUD éducation s'est porté dans l'ensemble des dossiers "intervenant volontaire" afin d'appuyer les collègues.
Quelques mois avant les jugements des TA de Montreuil et de Paris, le Conseil d'État, saisi là encore par SUD éducation, rendait une décision enjoignant « au Premier ministre de modifier les dispositions réglementaires relatives à l'indemnité de sujétions en faveur des personnels exerçant dans les écoles ou établissements relevant des programmes "Réseau d'éducation prioritaire renforcé" et "Réseau d'éducation prioritaire" » (décision du Conseil d’État, CE, 12 avril 2022, Fédération SUD Éducation, n° 452547).
Au 1er janvier 2023, en application de cette décision, l'ensemble des AESH (et des AED) exerçant leurs missions en éducation prioritaire ont commencé à perçevoir l'indemnité REP/REP+. Refusant de s'avouer totalement vaincu, le ministère a cependant instauré une indemnité REP parallèle, avec un montant minoré de 36% pour les personnels AED et AESH. SUD éducation a là aussi attaqué au Conseil d'État cette nouvelle inégalité de traitement, mais cette fois le Conseil d'État a considéré (dans une décision rendue le 28 mai 2024) que le ministère était dans son droit.
Dans sa décision du 8 novembre 2024, la Cour administrative d'appel de Paris (compétente pour le 75 et le 93) indique que « les accompagnants d’enfants en situation de handicap apportent leur concours au service public de l’enseignement dans ces établissements et à l’existence de sujétions comparables, le refus d’octroyer à l’intimé l’indemnité en litige a porté atteinte à l’égalité de traitement entre agents publics » (décision de la CAA de Paris, 9ème chambre, 08 novembre 2024, n°23PA00613).
Ce jugement est une véritable victoire pour l'égalité des droits et la reconnaissance des AESH ! Les syndicats SUD éducation Paris et SUD éducation 93 s'en félicitent. Forts de cette décision, nous appelons les AESH ayant exercé en éducation prioritaire entre 2020 et 2022 et n'ayant pas encore entamé de démarches de recours -avec SUD éducation ou un autre syndicat- à nous contacter rapidement.
Je ne travaille pas en REP/REP+, je n’ai donc rien gagné ?
Si effectivement vous ne percevrez pas cette indemnité, la victoire de SUD éducation au Conseil d’État et les décisions qui, nous l’espérons, vont suivre, constituent une avancée des droits pour toutes et tous, dans le sens où elles participent à la reconnaissance des AED et AESH comme personnels à part entière de la communauté éducative.
Voir Conseil d’État, décision n°452547, recueil Lebon, 12 avril 2022
Que fait SUD pour rétablir l’égalité totale ?
SUD éducation ne peut pas se satisfaire de cette demie mesure : si le versement de l’indemnité REP/REP+ aux AED et aux AESH est une victoire certaine, la mise en place d’une indemnité à deux vitesses s’inscrit pour nous dans une continuité de l’inégalité de traitement. Nous considérons que la décision du Conseil d’État n’a pas été respectée.
SUD éducation condamne cette décision scandaleuse du ministère et le message qui est sous-tendu : les AED et les AESH ne sont pas des personnels à part entière de l’éducation nationale, mais des sous personnels, sous payé·es, avec une sous-prime REP.
SUD éducation poursuivra son action, aux côtés des personnels, jusqu’à ce que cette nouvelle injustice soit réparée.
Un vrai statut, un vrai salaire pour les AED et AESH !
Retrouvez les autres articles relatifs à la question ici : éducation prioritaire