Lundi 8 avril 2024, les député·es ont adopté à l’unanimité un projet de loi permettant la prise en charge financière par l’État des personnels accompagnant⋅es des élèves en situation de handicap intervenant sur le temps méridien, pour l’accompagnement à la cantine et dans les activités. Elle doit maintenant repasser devant le Sénat avant d’être définitivement adoptée.
En 2020, le Conseil d’État rendait une décision, sur une procédure opposant une famille et la DSDEN d’Ille-et-Vilaine, indiquant que la prise en charge financière de l’accompagnement pendant ce temps ne pouvait incomber au ministère de l’éducation nationale.
Depuis, la situation est plus que confuse : si certaines collectivités territoriales permettent l’emploi de personnels ad-hoc, souvent des AESH qui cumulent ainsi deux emplois, la plupart ne prévoient aucune solution d’accompagnement des élèves y ayant droit. Dans certains départements, des arrangements permettent aux personnels AESH de poursuivre leurs missions sur le temps méridien.
Pour autant, cette proposition de loi est loin de nous satisfaire. Il va être demandé aux AESH de travailler toujours plus, renvoyant ainsi la question du temps de travail à des missions supplémentaires. [Ce texte vise à] “permettre aux AESH un temps presque complet en ajoutant aux 24 heures sur le temps scolaire, 8 heures pour la pause méridienne” justifie la rapporteuse du projet de loi, la députée Virginie Lanlo.
Au cœur des revendications des personnels AESH, la question du temps de travail est systématiquement renvoyée à la logique du “travailler plus” par les pouvoirs publics. Il a été un temps question du double employeur, pour pallier justement à ce manque d’accompagnement sur les temps méridien et périscolaire ; puis, pour trouver un équivalent dans le second degré, il a été mis sur la table le statut d’ARE (accompagnant⋅e à la réussite éducative) combinant missions d’accompagnement des élèves en situation de handicap et missions relevant de celles des assistant⋅es d’éducation.
Ainsi, la question salariale est éludée. Pourtant, si les salaires des AESH sont si bas aujourd’hui, c’est en partie à cause des temps incomplets imposés. Proposer des temps à peine complet (car 32h correspond à un 80%), pour une partie seulement des agent⋅es (car il n’y aura pas de missions supplémentaires suffisantes pour les 136 000 AESH), est une non-réponse.
D’autre part, l’extension des missions pose la question de la reconnaissance professionnelle. On semble considérer, au ministère comme dans l’hémicycle, que les AESH peuvent tout faire. Pourtant, et nous ne cessons de le répéter, les personnels AESH sont des professionnel⋅les de l’accompagnement scolaire (et ielles ont besoin de ce temps de pause méridienne aussi pour échanger et concerter avec les autres professionnel⋅les de l’école, notamment enseignant⋅es). Les compétences et savoirs-faire développés par la profession s’inscrivent dans le cadre de l’enseignement et de la pédagogie.
Les métiers dits du “care”, sous-reconnus, sous-payés, sont considérés comme polyvalents, au mépris des personnels les exerçants, mais également au mépris des ayant-droits. Considérer qu’un⋅e enfant en situation de handicap peut être accompagné⋅e, dans tous les aspects de sa vie qui requièrent des besoins, par une seule et même personne, revient à considérer que cela ne nécessite pas de compétences spécifiques en fonction de l’aide apportée.
SUD éducation continue à revendiquer la reconnaissance pleine et entière des AESH comme des professionnel⋅les de l’éducation nationale, exerçant une mission essentielle à l’école inclusive. Si l’accompagnement des enfants dans les temps méridien et périscolaire doit évidemment se poser, c’est dans le cadre d’un emploi statutaire, à la formation et aux compétences spécifiques.
SUD éducation revendique pour les AESH :
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la titularisation sans condition de concours, d'ancienneté ni de nationalité de tou·tes les AESH dans un corps de fonctionnaire par la création d’un métier d’éducateur·trice scolaire spécialisé·e ;
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l’augmentation des salaires avec une grille de progression salariale à l’ancienneté, un salaire minimum à 2 200 euros bruts (soit environ 1 870 euros nets, primes et indemnités comprises) ;
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l’accès aux primes et indemnités dans les mêmes conditions et aux mêmes montants que ceux fixés pour les autres personnels (notamment l'indemnité REP/REP+) ;
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la reconnaissance d’un temps plein pour 24 heures d’accompagnement auxquelles s’ajoutent les heures connexes pour le travail de préparation, de suivi et de concertation ;
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l'abandon des PIAL et de la logique de mutualisation ;
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une véritable formation initiale et continue, sur temps de service ;
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la création de brigades de remplacement pour assurer le remplacement des collègues absent·es ;
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un droit à la mobilité, interacadémique et intra-académique.